Délibérément rock dans sa version 2005, Saez le rebelle a bousculé le Galaxie d'Amnéville.

NANCY. - Depuis un premier concert, étonnant déjà, au Terminal Export de Nancy, il n'a cessé de progresser. Passé ensuite par le NJP puis à Seichamps, Saez a imposé une véritable stature scénique, un talent bien au-delà de celui du simple showman tant il y évolue à l'énergie, porté par ses émotions. Ils étaient plus de 3000 au Galaxie d'Amnéville, jeudi soir, venus pour ce véritable échange que constitue chacun de ses récitals... Une onde de choc partie des planches pour submerger la foule et repartir dans un incessant va-et-vient. Il s'agissait de la seconde date d'une nouvelle tournée qui le pousse avec son clan sur la route pour deux mois en attendant les grands festivals de l'été.

Plus indomptable que jamais, avec ses mots sans concession, le rebelle définitif est arrivé dans un déluge d'électricité. Deux guitares sans compter la sienne, souvent mise à contribution, et une rythmique percutante ont dominé le début d'un show enfiévré.

Un peu comme Dylan s'est toujours appliqué à remettre en forme ses plus grands classiques, Saez balance des versions expéditives de deux titres qui ont affirmé, d'entrée, sa différence. « Jeune et con », « Fils de France » deviennent ainsi de véritables décharges d'adrénaline. Dans cette furia incessante, le verbe a autant d'importance que le livret, définitif autant qu'exigeant.

« Comme deux sans-abri »

Jusque-là, pourtant, la version live du personnage, comme la dominante de ses précédents albums, interpellait son parterre avec des phrases jetées comme autant de slogans. Cette fois, il ne reste que la poésie dont la rigueur du show souligne un peu plus la beauté. « Debbie », « Marie » ou « Marilyn », les nouveaux titres assénés à la façon d'une volée de bois vert donnent le ton...

« Comme deux sans-abri au milieu de l'orage, sous les coups sous la pluie nous joignons nos visages ». sa façon d'évoluer n'appartient à aucune chorégraphie savamment préparée, Damien Saez bouge à l'instinct, joue avec son pied de micro avant de se multiplier sans ménagement sur la scène. Le passage derrière le clavier dont il est un virtuose sera malheureusement trop court pour sacrifier un peu plus à l'interminable sabbat. Les débuts de certaines chansons à dominante acoustique ne sont que des respirations pour mieux revenir à la folie rock.

Comme toujours, il a brocardé ce monde, ses inégalités, cette société tellement habile à sacrifier jeunes et faibles, ironisé sur ceux qui en tirent les ficelles pour revenir à ce refrain leitmotiv assurant que l'avenir passe par le sourire d'un enfant. Impressionnante sa reprise de « Nights in white satin » des Moddy Blues, dix fois supérieure à celle qu'avait osée son aîné Bashung. A Lille, 5000 spectateurs attendent Saez et les siens, 8000 à Bruxelles, 10 000 au Zénith de Paris. L'aventure se poursuit loin des stéréotypes de la bande FM. Il a promis de revenir à l'automne seul avec sa guitare et son piano, réalisant ainsi un vieux projet longtemps repoussé.

Jean-Paul GERMONVILLE