En ces temps de Superfunk, Air et autres Micronauts, un jeune de 22 ans qui débarque avec sa voix séditieuse et ses guitares couillues a toutes les chances de passer inaperçu. A moins que son premier album - conçu, avec «beaucoup d'engueulades», en compagnie de l'ex-Opposition Marcus Bell et de Jean-Daniel Gloriosi - s'ouvre sur une forme de manifeste sardonique: Jeune et con. Qui dit entre autres ceci: «Puisqu'on est jeune et con/ Puisqu'ils sont vieux et fous/ Puisque des hommes crèvent sous les ponts/ Mais ce monde s'en fout... Mais je sais qu'on est quelques milliards à chercher l'amour.»

«Emotion picturale». De là, accueil critique partagé, mais programmations radio, clip en rotation sur les chaînes musicales et ventes qui décollent - on parle de 40 000 CD déjà écoulés. Pour un «anachronisme», Saez ne se porte pas trop mal et s'en prive d'autant moins pour l'ouvrir. «Ce qu'on appelle la French touch ne me touche pas, ne m'intéresse pas. Le domaine où je me sens le plus à l'aise est celui de l'émotion, presque picturale, qui permet de découvrir une société à travers les mots et d'y trouver sa place. Les bidouillages informatiques contribuent à l'évolution musicale, mais ils ne font pas avancer ma réflexion. Et puis, comment peut-on entrer dans cet univers électronique, lorsqu'on a passé autant de temps à jouer du piano (dix ans de conservatoire et un diplôme à la clé, ndlr.), qui est l'instrument classique et complet par excellence ? »