A force de clamer qu'il était "jeune et con", on a voulu vérifier si Saez l'était vraiment. L'occasion de lui poser quelques questions un peu musclées, au grand plaisir du jeune homme, et de découvrir que derrière Saez le rockeur rebelle, il y a Damien la fleur blessée.

Tu déclares vouloir que l'on s'intéresse plus au fond qu'à la forme. Est-ce que cela signifie que tu penses que musicalement, ce que tu fais n'est pas très original ?

Je pense qu'il n'a aucune originalité dans ce que je fais. Mais je n'irais pas jusqu'à dire que c'est banal. C'est un peu les deux en fait. Si j'étais méchant avec moi-même, je dirais que "Jours Etranges" se rapproche d'un karaoké de rock. Maintenant, il y a quand même de la recherche dans les arrangements, dans les sons, comme celui du modem, par exemple. Et puis il y a les textes. S'ils n'avaient pas un sens pour moi, je ne pourrais pas les chanter.

Dans tes paroles, tu pointes des problèmes connus. Tu n'as pas l'impression d'enfoncer des portes ouvertes et de ne pas apporter de solution ?

Mon album est plus un cri qu'une solution. Mais je ne suis pas sûr que les solutions existent. Par contre, je sais que les problèmes existent et qu'ils méritent d'être signalés. Je pense que c'est plus percutant de le faire dans un disque que dans un journal télévisé. Il est de toute façon toujours bon d'enfoncer des portes ouvertes quand elles ont tendance à se refermer. En même temps, je ne suis pas sûr que ce que je dis soit si convenu, par rapport à ce que j'entends autour de moi dans le rock, à la radio.

Quel est le message, finalement, de ces textes ?

Notamment dénoncer une certaine jeunesse que j'ai connue, qui préfère passer ses soirées à ne rien faire, à "discuter". En fait, à fumer du shit. Je parle de ce que j'ai vu et je n'ai aucune envie d'être démago avec la jeunesse. D'ailleurs ça me vaut pas mal de critiques de journaux de jeunes, qui trouvent mes chansons prétentieuses, sauf que dans Jeune et Con, j'ai la décence de m'inclure dans cette jeunesse en utilisant le "on". J'ai fait partie de cette jeunesse, par sociabilité, mais ça m'énervait déjà.

Tu as été jusqu'à où ... par sociabilité ?

Un peu plus loin que la coke. Sans aller jusqu'à l'héroïne. Je n'aurais pas eu la force d'en revenir. J'ai vu des personnes partir à cause de la drogue et du mal de vivre. Je suis moi-même obsédé par des idées morbides. Et le disque n'est qu'une thérapie que pendant son enregistrement, ou sa reproduction sur scène. Mais au plus déprimé que je puisse être, je préfère chialer pendant quinze jours ou écrire que de reprendre de la drogue.