Interviewer un journaliste… Un peu l’histoire de l’arroseur arrosé non? Et puis pourquoi pas après tout ! Nous sommes allés rencontrer Yves « Whybee » Bongarçon rédacteur en chef de Rolling Stone, et ex de Rocksound. Celui-ci ayant rencontré Damien Saez à de nombreuse reprises, et l’ayant toujours soutenu, il nous semblait être la personne idéale pour aborder Saez, son travail, sa personne, – les deux étant difficilement dissociables – sous un autre angle. Au moins différent, sinon plus critique et avec plus de recul que le notre puisque plus professionnel.

Quand et comment avez-vous découvert Saez, et qu’avait-il de plus selon vous que les centaines de disques que vous devez écouter chaque mois ?

Alors j’ai découvert Damien, dans le bureau de Ivan Cellier, qui était à l’époque je crois directeur du marketing chez Mercury Island, label qui avait des vues sur Damien. Il se trouvait que Ivan avait très envie de savoir ce qu’en pensaient certains journalistes, etc. A ce titre, il m’avait fait écouter des démos. C’est relativement vieux. Quand est sorti le disque déjà ?

Y’a 4 ans, octobre 99…

Oui alors ça devait être au printemps 98. J’avoue que j’ai été saisi à l’époque par la voix, par l’engagement, par le côté un peu extrême des interprétations qui n’étaient que des démos a priori. Et dès cette époque, je me suis dit « ah ouais y’a quelque chose c’est clair » ! Je savais pas trop à quoi ça tenait, j’avais pas vu le personnage, pas de photos rien du tout. C’était juste le côté impulsif, volontaire, engagé, rageur, en même temps plaintif, y’avait plein de choses. J’avais entendu 2-3 titres et j’avais trouvé ça assez bouleversant. J’avais d’ailleurs dit à Ivan à l’époque ce que j’en pensais, en lui disant de me tenir au courant si un disque sortait ou si y’avait quelque chose de prévu avec Damien. Comme j’avais été probablement un des plus enthousiastes dans mes réactions à l’époque, c’est vrai que dès qu’ils ont envisagé de sortir l’album, j’étais un des premiers au courant, et je crois même que j’ai fait sa première interview professionnelle. A ce moment-là ça se passait aussi chez Universal, je me souviens on était juste à côté du bureau de la salle de presse, on a fait un peu connaissance. Je me suis retrouvé en face d’un gars que je n’imaginais pas du tout comme ça en fait physiquement. Je ne l’avais pas vu en photo entre temps, on se fait toujours une image mentale des gens et je ne l’imaginais pas du tout comme ça. Et ce que j’ai apprécié dans cette rencontre, c’était le côté un peu interrogateur, introspectif, j’avais l’impression que le type m’auscultait, cherchait à savoir autant sur moi que moi je cherchais à savoir sur lui. Donc effectivement, ça a commencé comme une interview plutôt classique et ça s’est transformé très vite en entretien. Et je crois que ça lui a plu autant que ça m’a plu. Et comme j’étais relativement enthousiaste, voir complètement, j’avais fait un papier un peu de cette nature, – à l’époque j’étais pas sur Rolling Stone, j’étais sur rocksound – et j’ai pris la décision en tant que rédacteur en chef de rocksound de le soutenir. Pour plusieurs raisons. D’abord pour l’authenticité, la franchise, la profondeur, l’engagement, ses doutes, tout ça me séduisait, et je pense qu’il était en phase avec un certain nombre de gens du même âge que lui ou plus jeune. La suite l’a prouvé d’ailleurs. Mais la rédaction de rocksound était au départ assez réticente parce que Damien était associé à de la chanson, pas à du rock. J’ai un peu insisté lourdement pour qu’on tienne le cap sur Damien, que j’ai revu à ce moment là à plein d’occasions, ses premiers concerts, etc. et petit à petit… un espèce de… je sais pas, est-ce qu’il y a le mot amitié… mais pas loin, est un peu née entre nous. Ce n’est pas quelque chose que je recherche, du tout, avec les gens. Je ne recherche pas du tout la connivence, je fais un métier, et dans le cadre de ce métier je rencontre des artistes, je ne tiens pas à devenir leur copain. C’est même la pire des choses. En revanche, avec Damien, je ne me suis pas tellement posé la question. Le garçon me plaisait, apparemment il était pas indifférent, on a vécu ça simplement, sans se poser trop de questions, sans se dire est-ce que ça va nous embarrasser plus tard, difficile d’écrire sur quelqu’un qu’on connaît bien, difficile de dire avec franchise des choses sur le papier quand en dehors on connaît relativement bien l’individu et que en plus celui-ci est devenu sinon un ami au moins un proche ; je me suis pas trop posé la question parce que c’était assez naturel.

Oui, justement je me demandais si c’était nécessaire de garder une certaine distance ou un recul…

Toujours, toujours, et c’est ce que je fais tout le temps. C’est un cas totalement isolé, ça fait 15 ans que je fais ça, c’est un cas totalement isolé dans ces 15 ans.

Pourquoi ça ?

Pourquoi ? Pourquoi j’en ai bavé ? Parce que… il me semble que j’avais envie de lui dire certaines choses, une certaine limite, une certaine gestion de certaines choses à l’époque qui me paralysaient surprenantes on va dire, sur lesquelles j’avais peut-être des bémols, et que par amitié, j’ai pas osé lui dire. Et ça m’a mis très mal à l’aise. L’interview s’est passée ici, dans ce bureau, lui je pense qu’il ressentait à peu près la même gêne. C’était la dernière fois qu’on s’est parlé pour une interview. Donc y’a eu ce problème là. Depuis, on s’est jamais reparlé officiellement. Cela étant mis à part, on s’est revus pleins de fois depuis, à titre privé.

Qu’est-ce qui vous touche chez lui ?

Qu’est-ce qui me touche chez lui ? Je pense qu’on voit toujours dans les gens les plus jeunes, quand on a mon âge, une part de romantisme, une part de nostalgie, y’a plein de choses. Je pense que quand on rencontre quelqu’un comme Damien, on se dit qu’il a déjà vécu, que malgré son jeune âge, ce qu’il a mis dedans, ses jeunes années, il y a un peu la notion de ce qu’on aurait aimé être, fatalement. Ma génération, la suivante, et celle d’aujourd’hui je pense, c’est un peu le rêve de tout le monde de s’emparer de la musique, de la langue…

De vivre sa passion, de laisser quelque chose…

Voilà, d’apporter quelque chose, d’être devant les gens, transmettre une émotion, un message, s’engager, même en disant des conneries, en faisant des erreurs, ça fait partie de sa sincérité. C’est aussi ce que j’aime bien chez lui, c’est que je ne suis pas toujours d’accord avec lui, loin s’en faut ! Il dit parfois des conneries, il en dit même souvent, il en fait aussi ! Mais c’est toujours fait avec une sincérité absolue. Et avec un sens du don, du partage, de l’enthousiasme… Et puis en dépit de certains de ses textes, son côté non résigné. C’est ce qu’il a montré avec sa chanson au lendemain du 21 avril qui avait un côté pas résigné, c’est quand même quelqu’un qui a écrit Jeune et Con, qui parfois dans ses textes a un vague sentiment de sans issue, de désespérance, mais il a ce côté fondamental en lui.

Ce que j’apprécie aussi, parce que je suis totalement différent, c’est ce côté intègre, j’allais dire ce côté républicain, tout simplement. Je trouve que c’est symbolique, et je suis très attaché à ça. Que ce soit en plus quelqu’un que j’aime qui me rappelle à moi , qui suis beaucoup plus vieux, et qui ai peut-être un peu perdu ces notions en cours de route, j’aime bien que ce soit quelqu’un qui soit de mère algérienne, de père espagnol, et qui a grandi en plein milieu de la France, qui me rappelle ces valeurs fondamentales de la République, de ce pays dans lequel on vit, et qui me dit qu’il ne faut pas oublier certaines choses, qu’on les a peut -être perdues en route, qu’on est entrain de s’enfermer dans des choses un peu égoïstes, communautaires, qui sont quand j’y réfléchis des notions que je réfute et qui m’agacent, je suis totalement le contraire de ça. Mais la vie passe, les choses sont ce qu’elles sont, on fait tous des compromis, on s’arrange avec la vérité, avec les évènements. Et je crois que si j’aime Damien Saez, c’est que quelque part, il a eu cette notion de coup de pied au cul. Quelque part le mec il m’a mis un coup de pied au cul. Et on remercie toujours ses amis quand ils font ça, c’est la moindre des choses, donc voilà !

A côté de ça, c’est un garçon qui s’intéresse à l’autre, ce que je ne pensais pas du tout être le cas au départ. Je le dis avec d’autant plus de sincérité aujourd’hui. Je pensais que c’était quelqu’un, sinon égocentrique au moins égocentré, un écrivain de chanson quoi, quelqu’un de tourné vers lui, comme on dit on avait l’impression que ses yeux étaient tourné à l’intérieur de lui, c’est un peu ça les chanteurs : j’suis malheureux et puis voilà. Ce que j’ai découvert en fréquentant Damien c’est qu’il s’intéresse à l’autre. Et que quand on passe des soirées avec lui, on ne va absolument pas parler de lui, on ne va pas parler de ses chansons de son travail, on va parler de tout autre chose, il va s’intéresser à vous. Le nombre de questions qu’il m’a posé sur comment on fait un journal, comment on fait Rolling Stone, c’est des soirées entières ! Compte tenu du métier qu’il fait et de tout ce qu’il y a autour, dont nous public on ne perçoit qu’une parie, tout est tourné vers l’ego, vers l’artiste, je trouve que c’est assez sain qu’il soit resté de cette manière là. Mais c’est une forte tête aussi.

Alors a contrario, les points faibles, ou ce qui pourrait lui porter préjudice, vous les voyez où ?

Il arrive qu’à un certain moment, l’intransigeance soit un défaut. Parce que, ça part d’un très bon sentiment, mais prendre en compte l’autre, ça veut dire aussi comprendre ses limites et à un moment les accepter en disant, ok, c’est comme ça. Allez plus loin, c’est forcément faire violence. Il faut que Damien fasse violence. Un peu moins avec les années qui passent. Je me souviens de concerts assez homériques, quand le public ne lui plaisait pas, ne bougeait pas ou quand le public ne réagissait pas, il partait ! Je me souviens d’un concert à Poitiers où au bout de trois chansons il leur a dit carrément, enfin en des termes plus mesurés que ça mais ça voulait dire ça, vous être un public de merde, et tant que ça ne sera pas autrement je ne reviendrai pas chanter. D’un côté c’est couillu, faut y aller quant y’a 600 ou 700 personnes dans la salle. En même temps, des fois, les gens c’est des gens ! C’est gens qui ont payé, qui sont venus. Après qu’on leur reproche que certaines fois ils ne bougent pas, que certaines fois ils ne réagissent pas, c’est le jeu aussi, y’a des gens différents, et des fois on réagit pas.

Si on accepte qu’il y ait des concerts fabuleux, il faut aussi accepter que certains soient moins réussis, ça peut pas toujours être la même chose…

Voilà, exactement ! Et un des défauts de Damien, mais je crois qu’il s’est beaucoup corrigé dessus, c’est parfois d’avoir été trop intransigeant. Ca a peut-être résisté à d’autres, mais ça ne résistera pas à moi.

On voit qu’il a évolué. Tout à l’heure en arrivant devant la salle, il a spontanément posé des questions aux fans présents sur ce qu’ils faisaient, le bac, etc. Ce qu’on aurait pas forcément imaginé y’a 3 ans…

Il y a plus d’humanité. Enfin, il y a toujours eu de l’humanité mais jusqu’à il y a un an, c’était de l’humanité un peu apprise, un peu théorique, là il commence à pratiquer l’humanité réelle. Il prend le temps de discuter dans la rue avec les gens, savoir ce que vraiment les gens pensent. Jusqu’à présent, c’était un peu différent, c’était sincère, mais du coup on arrivait parfois dans ces situations d’intransigeance absolue que tu pouvais à la limite interpréter comme des caprices car tu voyais la différence entre les deux. Mais je crois qu’il a appris. Toutes proportions gardées, par rapport à l’album précédent, God Blesse est un peu un échec, parce qu’il a été moins vendu, moins compris, moins soutenu, parce qu’il est plus compliqué, et là, du simple fait de Damien. Damien l’a voulu compliqué, il a pas lâché sur les deux disques, etc., etc. Il a mis un peu la pression à tout le monde là-dessus. On l’a laissé faire parce que c’est un peu un pitbull, il est resté accroché. Fondamentalement, on est nombreux à penser qu’avec 5 ou 6 chansons de moins, God Blesse aurait été un bon, très bon disque.

Alors après ça l’avenir, vous le voyez comment ? Potentiel pour durer ?

Ah oui oui. Il a l’étoffe d’un grand. Parce qu’il se charge de plein de choses. Parce qu’il n’est pas comme la plupart des artistes. La différence qu’il a avec les autres, ne serait-ce que d’un point de vue technique, c’est que lui, la technique, la base, ce qu’il faut savoir en musique, traduire un idée entre un son qu’il entend, un truc dans sa tête, et sa traduction immédiate en notes sur un portée, c’est dans la seconde. Ca, il le possède en lui avec le conservatoire, les cours d’harmonie. Ca il l’a en lui. Et il le possède à jamais, ce qui lui permet d’avoir une liberté totale par rapport à ça. Ce n’est pas le cas de tout le monde, il y a des gens qui bossent beaucoup, pour traduire ne serait-ce qu’une idée dans des notes sur un portée. Y’a des gens qui passent leur vie à ça. Le timbre, le truc juste, lui, c’est quasi instantané. Ca lui laisse plein de temps pour autre chose, ça lui laisse plus de temps pour absorber la vie pour s’imprégner des autre, pour s’imprégner de situations, de ce qu’il y a autour de lui, pour s’intéresser à l’environnement politique, humain, etc.

Et c’est ce qui fait que ces gens-là ont un encolure d’avance sur les autres. La chanson qu’il avait faite après le 21 avril, à la fois elle tient debout, et elle a été faite dans la foulée, parce qu’il y avait tout un bagage qui était là, qui était prêt à servir, et très vite, il peut coller des choses en s’imprégnant. Et puis il est en phase. Parce que quand j’entends… non on va pas citer de nom, mais des artistes un peu dans la même veine, ou un peu le même âge, avec la même longévité, je citerai toujours pas de nom, chanter des trucs s’une stupidité confondante, ben y’a pas photo ! On voit tout de suite qu’il y en a un qui est là pour longtemps, pour durer, y’aura des hauts, y’aura des bas, y’aura des grandes fulgurances et des grands coups de génie, et y’aura des périodes mineures. Mais il est là pour durer.

C’est marrant parce qu’à part vous, les échos qu’on peut avoir dans les autres médias sont pas toujours franchement bons, sa réputation est pas terrible, y’a souvent une sort controverse…

Oui parce qu’il n’a pas ménagé les médias non plus. Je n’ai jamais eu d’exemple devant les yeux, mais on m’a relaté des passes d’armes avec certains confrères, des choses qui se sont mal passées. Parce que quand on est avec lui, il faut être avec lui, faut pas venir faire une interview pour passer le temps, parce qu’il nous remet vite à notre place, et il a raison. Soit on vient l’interviewer et on a des choses à lui dire et des choses à lui demander et il est disponible, à 300 % même. Soit on est là parce que c’est un travail de commande et ça ne nous intéresse pas plus que ça et lui il capte ça très vite, et il fait vite sentir aussi, parce que ça fait partie du personnage.

Vous préférez le côté énervé ou plus posé ?

Je préfère les belles chansons. Je me fous de savoir si c’est énervé ou pas, si c’est calme, piano ou guitare. Menacés mais libres est une belle et grande chanson pour résumer ça à une chanson… Une certaine fulgurance stylistique, « quand on est vieux les poings montent moins haut », ce côté fulgurance, j’ose pas dire du poète, mais y’a un peu de ça parfois. C’est ce que j’aime chez lui. Et qui me renvoie moi, ou qui peut renvoyer n’importe quelle génération, c’est ça aussi l’important, et c’est là aussi où il a une supériorité, c’est qu’il ne s’adresse pas qu’à un public, même si des gens de son âge, de votre âge son très en phase avec ce qu’il écrit, parce qu’il est le fils de sa génération. Mais des gens comme moi, un peu plus vieux peuvent se reconnaître dans une fulgurance qu’il a écrite.

Vous avez un gros coup de cœur actuellement parmi les nouveautés ? Un disque à conseiller ?

Un gros coup de cœur… Ouais j’en ai mais c’est pas tellement représentatif de ce qui se fait actuellement, c’est des choses un peu isolées, donc j’ai un peu de mal à en parler… En plus, ça ne dira rien aux gens parce que ce n’est pas encore sorti.

Mais sinon j’aime bien le disque de Diam’s. Je trouve ça important qu’une fille fasse un disque comme ça aujourd’hui en France. C’est la première fois qu’une fille utilise des mots de mecs pour parler d’un certain nombre de choses. J’ai eu un gros coup de cœur récemment sur l’album de Julie Delpy qui n’a pas très bien marché, chacun est libre, mais je trouve que c’est un album délicat, intelligent, sensible. Sans un autre genre, j’aime beaucoup le dernier album de Silmarils, j’ai toujours bien aimé Silmarils, on les a beaucoup taxés d’être des poseurs, mais ça fait partie du jeu ! Avec la musique qu’ils font, on va pas leur demander de se mettre un masque et d’avoir l’air triste. J’aime beaucoup l’album de Bénabar, avec le précédant, il a eu beaucoup de succès, tout le monde a aimé son côté petit garçon impertinent qui chante des choses drôles sur les gens qui ont trente ans. Du coup on l’avait mis un peu dans une case, ce qui pouvait être très dangereux pour lui, mais avec le nouvel album, il s’en est sorti avec une magnifique élégance. Il fait des chansons rigolotes, mais en même temps il y a des très très belles et très très grandes chansons sur son dernier album, il y a une chanson qui s’appelle Je suis de celles et qui est magnifique. Un mec capable d’écrire du point de vue d’une femme une chanson comme ça, c’est admirable. Donc ouais si j’ai un coup de cœur, c’est Bénabar.

La médiatisation actuelle du rock, vous voyez ça comment ? Ca profite à la scène française ?

Ca a déjà profité, il y a beaucoup plus de groupes de rock qui se retrouvent en train de faire des albums sur des labels indépendant ou sur des majors, qu’il y a 4 ou 5 ans. Il y a une scène française qui est en train de se renouveler complètement, qui est beaucoup moins… comment dire…

Qui ose plus ?

Qui a moins peur qu’avant, qui se pose moins de problèmes d’éthique, de morale un peu à la con, comme s’en est posé la génération précédente. Pour en arriver à quoi ? C’est sur les mecs sont restés intègres, ça on peut pas leur enlever, ils sont restés intègres du début à la fin. Au total, ils ont fait quatre albums, ils se sont séparés et ils sont mécanos dans des garages ! C’est peut-être leur idée d’avoir fait de la musique. Moi l’idée que j’ai d’un musicien c’est qu’il puisse faire ça toute sa vie, et en vivre toute sa vie, donc à un moment y’a eu des réactions typiquement françaises, extrêmement… des postures intellectuelles sur la musique de qualité, la musique de pas qualité, qu’est-ce qui fait la musique de qualité…

Comme le grand débat commercial pas commercial…

On sait quoi ! Y’a des gens qui font de la bonne musique et des gens qui font de la mauvaise musique, point à la ligne. A côté de ça, savoir que si c’est du rock, de la world music, du raggamuffin, du rap, du hard rock, du néo métal, de la chanson on s’en fout !

Y’a du bon et du mauvais partout…

Y’a une scène française qui existe, qui est diverse qui tend un peu à se mélanger aujourd’hui et je trouve ça super. Là, ces dernières années l’état d’esprit a eu tendance à changer. Les rockeurs invitent des rappeurs, n’hésitent pas à se faire remixer par des DJ. Un beau texte, un musicien n’hésite pas à en faire un rock dur ou à en faire une belle chanson dépouillée, sans se soucier de savoir si ça ressemble à machin ou pas. Je crois que le grief qu’on faisait au début à Damien, un an et demi après, plus personne lui faisait, on s’en fout que ça ressemble à Noir Désir ou pas. Mais c’est ça le drame français, y’a des journalistes qui brament en permanence « ouais mais c’est pas original » et en même temps chaque fois que quelqu’un fait quelque chose on lui dit ouais ça ressemble à machin. On se pose moins la question de savoir si Muse ressemble à Radiohead, ou si Radiohead ressemble à Blur. On se pose moins la question quand c’est anglo-saxon, alors de grâce faut arrêter de scier systématiquement la branche sur laquelle on est assis.

Anna