Pour la quatrième date de sa tournée des grandes salles, Damien Saez, toujours à vif et révolté, a embrasé samedi les quelque 6 000 spectateurs du Zénith Europe de Strasbourg.

Ils sont rares ces artistes encore capables de galvaniser une foule par la combinaison magnétique de leur aura, de la profondeur de leur discours et de la forme qu’ils y mettent.

Damien Saez est de ceux-là, avec ses textes percutants, ses pamphlets incisifs en prise avec les tourments d’une société qu’il n’a jamais renoncé à bousculer mais aussi ses chansons qui dépeignent les souffrances incandescentes d’amours déçues.

Et c’est justement ainsi qu’il ouvre son concert, sur ces ruptures avec Marie puis Betty, sur ces élans brisés qui confinent à l’isolement mental dans un vieux rade portuaire.

Un déluge électrique

Brel s’invite alors furtivement et ses accents désabusés cognent avec les riffs sombres des guitares de Daniel Jamet et Franck Phan.

S’abat ensuite un déluge électrique marquant la Fin des mondes via ce couplet anti-finance crachant un vibrant « Fuck you Goldman Sachs ! ». Break de batterie, extinction momentanée du feu pour mieux relancer le brasier après une pause d’un quart d’heure.

La seconde partie de concert, immédiatement versée dans l’électro et des sonorités club, débute avec des samples de Snoop Dog et les beats bien funk du Soul Makossa de Manu Dibango. Voici Miami , chanson-titre du dernier album du même nom de Saez, aux paroles crues et bien balancées sur les excès de drogue, de sexe et d’alcool.

Avec cette rage omniprésente teintée de fragilité dans ce timbre éraillé, il y a du Cantat sur scène, en contestataire universel, orfèvre de chants révolutionnaires à tiroir et de poèmes bruts et puissants à l’instar des vibrants J’accuse et Jeunesse lève-toi. Oui, Saez, le héraut d’une génération qui connut des Jours Étranges à l’orée des années 2000, a mûri, et son public avec. Jeune et con n’est plus.

Et samedi, jusqu’à quasiment minuit, cette révolte en vers et en verbe fut vivifiante, à l’image de son généreux porte-étendard.

Alexis Fricker

Source : www.dna.fr