Varsovie-L’Alhambra-Paris n’est rien d’autre qu’une traversée du désert européen, un voyage au plus profond des blessures de l’âme, des ruptures. Ruptures, il en est plus que question au travers des deux premiers disques de ce triptyque : Varsovie et l’Alhambra . Tous deux sont imprégnés des mélancolies d’un homme, attachant ou rebutant, c’est selon. L’habillage de ces deux tomes n’y changera rien car armé d’une guitare sèche et de sa voix la plus criarde, notre dijonnais pavoise de long en large le mal-être amoureux. Enregistrer ces dix-neuf comptines sans en connaître les textes n’améliorera pas l’idée désastreuse dont se fait le détracteur habituel de Saez. Pourtant, cet ensemble d’incohérences et de défauts, que tous ses opus contiennent, procure une odeur insoupçonnée d’instantané, un polaroïd d’humeurs et de sentiments. La qualité des textes ne rend l’ambiance que plus transcendante. Ce tout apporte une couleur à l’instant, au périple vagabond d’un « tourtereau sans tourterelle » (titre Anéanti). La patte Brelienne est très présente, tant dans le fond que dans la forme : L’articulation des mots autour des mélodies, la présence de nombreux personnages ainsi que l’utilisation du moi (« Y’a Bartek, y’a Janek, y’a Voïtek et y’a moi » titre Varsovie) ou d’autres termes employés par le Grand Jacques ( écouter, entre autres, Varsovie, Anéanti, Putains vous m’aurez plus, L’enterrement, etc.).

Paris fait office d’accalmie et reste de loin le tome le plus abordable de ce tableau. Beaucoup plus léché, recherché, ce troisième volet n’en est pas moins brut. Les textes sont tout aussi mélancoliques, mais bien moins maladifs et pessimistes. Deux hors-propos se permettent d’apparaître : On a pas la thune et Jeunesse lève-toi, le second rappelant l’auditeur aux années Jours Étranges, le terme « jeunesse » y étant pour beaucoup. Le triptyque est un tout, le retour aux origines, ce paysage humain et fragile. Enregistré en une matinée, le jour de son anniversaire, Saez revient avec l’opus acoustique dont il rêvait, toujours plus ennuyeux pour certains et toujours plus attachant pour d’autres.

Posthuman666

Source : www.destination-rock.com