S’il est un artiste rare et discret en France, c’est bien Damien Saez. Parce qu’il refuse le jeu de la promotion traditionnelle, c’est sur scène –et seulement là, qu’il prétend défendre sa musique et partager un peu de son univers avec ses fans. C’est donc sur scène que nous sommes venus le voir, hier, au Zénith de Paris.

Cette discrétion de l’artiste est proportionnelle à la ferveur qu’il déclenche chez ses admirateurs. C’est ainsi dans un silence total et presque religieux que l’artiste entre en scène. Seul dans un halo de lumière blanche, il déclame des vers de sa voix vibrante devant un parterre de spectateurs transis, le briquet au poing, et comme suspendus aux lèvres de l’artiste. On entend même quelque « chut » dans l’assistance ; l’instant est magique et donne tout son sens au mot « communion ». Il en sera de même pendant les trois heures que durera le concert : le public chante, danse, crie et lève le poing, capable de reprendre à tout moment n’importe quelle chanson du répertoire. L’artiste le sait et en joue, prenant des poses et lançant des phrases provocatrices dont il est le premier à s’amuser. On ne l’imaginait pas si taquin, Damien Saez. Qu’il vienne haranguer la fosse sur « Miami », esquisse quelques pas de danse sur un mix de chansons de Michael Jackson ou reste derrière son pupitre, il dégage une énergie presque pétrifiante, un charisme qui ne s’embarrasse d’aucun artifice visuel ou musical.

Malgré cela, on sent un véritable travail sur les lumières (qui, tantôt sombres, tantôt très agressives, épousent idéalement le caractère des chansons) et les réorchestrations. Nombreuses sont ainsi les chansons qui font l’objet de réarrangements et l’on a même parfois l’impression de voir le concert se construire devant nous, comme lors d’un enregistrement studio. En effet, sensible aux réactions de son public, Saez joue au chef d’orchestre et demande en direct aux très bons musiciens qui l’accompagnent de ralentir ou d’accélérer, de dynamiser un titre ou de l’apaiser. C’est ainsi que le chanteur communique avec son public : avide de musique et de chansons, il ne parle guère entre les titres mais préfère montrer son enthousiasme par des changements de setlist, des improvisations musicales et des sourires qui, parfois, semblent lui échapper. Car malgré ses textes durs, son phrasé véhément et son look loin d’être glamour, Saez prend un plaisir évident à être sur scène. Il finira d’ailleurs le concert à genoux, devant un public tout aussi ému et extatique que lui, à qui il adressera quelques mots avant de quitter la scène : “Merci pour la fidélité… J’avais 16 ans, j’en aurais pas rêvé autant”.

Nous non plus, d’ailleurs, on ne pensait pas sortir de ce concert avec autant de belles images en tête. On a quitté le Zénith vidé, mais avec la sensation d’avoir véritablement découvert un univers à part. Damien Saez est un artiste à voir et à vivre sur scène ; plus que des concerts, il offre des expériences. On ose à peine imaginer ce que sa liberté et sa force lui dicteront pour le 14 juillet, date symbolique qu’il fêtera aux Francofolies, sur la Grande Scène de Saint-Jean d’Acre. On y sera, et l’on vous conseille très vivement de nous suivre.

Source : francofoliesrochelle.tumblr.com