Dans le Lot-et-Garonne, ce festival à la bonne tenue évident a rassemblé au total 52 000 quidams enthousiastes.

Le festival d’été, c’est un peu l’équivalent de la ville-étape pendant le Tour de France. Personne ne connaît l’endroit mais on y va quand même. C’est comme cela que le petit reporter découvre des endroits incroyables sur la route de Marmande. Ainsi ignorait-il l’existence de la riante bourgade de Libourne qui, renseignements pris, signifierait La Joyeuse en langue occitane.

Fièrement implantée au cœur même de la capitale de la tomate, Garorock est devenu au fil des années une institution à ne pas manquer même si les organisateurs peinent un peu pour trouver le bon créneau pour loger l’engin sans avoir à souffrir de la concurrence acharnée de la champignonnière festivalière de l’été. Cette année, le site choisi disparaissait encore sous deux mètres d’eau il y a encore quelques semaines. Suite à la décrue de la Garonne et d’hectolitres de sueur bénévolement offerts par la population, les lieux ont été remis en place de manière remarquable, compte tenu de la situation. A peine débarqué du tortillard en provenance de Bordeaux, la marée de sacs à dos emplis de verrerie est accueillie par Totor, ci-devant berger allemand de la gendarmerie nationale et, accessoirement, chien renifleur d’herbe qui rend nigaud. Autant dire que les amis des bêtes ont perdus quelques adhérents ce jour-là. Une fois sur le site, l’entrée est devenue un apéro géant car le SO [service d’ordre] a pour consigne de ne laisser aucune bouteille en verre sur le camping et dans le festival. Comme le déclarera, désabusé, un jeune au sac rempli de bouteilles : « C’est un peu tôt pour se mettre une charge mais il va falloir que je le fasse quand même ! »

Avec une programmation aussi electro que rock, l’histoire retiendra de la journée du vendredi une très belle prestation du duo afro-américain The Bots , sorte de White Stripes version Bad Brains revue et corrigé par Channel 3. Evidemment, un quart d’heure plus tard, Bad Religion démarre sur une des deux scènes principales situées côte à côte plusieurs centaines de mètres plus loin. Ça, c’est le mauvais côté des festivals quand le spectateur n’a pas le don d’ubiquité. Avec la déferlant métal, c’est incroyable comme Bad Religion sonne désormais comme un groupe punk classique et ce n’est pas plus mal. Un peu plus tard, c’est au tour d’Asaf Avidant de balancer son folk-rock israélien avec des envolées lyriques quelquefois agaçantes.

Après une nuit largement arrosée par les cieux venus à la rescousse des festivaliers qui n’avaient plus rien à mettre dans leur pastis, le petit reporter prend une cure de jouvence avec Fidlar, groupe garage US qui joue également sur des guitares assez défraîchies. Sur la scène Garonne, les choses s’accélèrent après la prestation exotique du Québécois Patrick Watson et le concert de Saez qui, doigt accusateur à cran d’arrêt et regard concerné, finit par déclencher une bruine désagréable à force de vocifération. L’amateur de poésie française fracassante retiendra le « Fuch You Goldman Sachs ». Entre-temps, l’amateur de concerts rentre-dedans se sera fait passer au rouleau-compresseur avec le sourire grâce à Willy Moon suivi de Skip The Use.

Après un concert de Bloc Party au décor digne d’un épisode de Cosmos 1999, la rumeur de séparation prochaine va bon train depuis le remplacement du batteur par une charmante demoiselle. Alors que minuit est largement dépassé, Black Rebel Motorcycle Club conclut la partie rock avec une prestation d’enfer magnifiquement soulignée par la nuit.

Le dimanche se déroule sous un cagnard sans nom avec une affiche où il apparaît, après coup, que rien n’était à ignorer. De la soul vintage des Espagnols de The Excitements au mur de son apocalyptique d’Airbourne, en passant par le garage bric-à-brac des bordelais de JC Satàn et le show aussi haut en couleur que surprenant de Mika, l’apothéose fut obligatoirement The Stooges avec un Iggy Pop complètement monumental comme d’hab’. Des journées comme celle-là méritent un T-shirt avec l’inscription J’ai survécu au 30 juin 2013 et pas toi !.

Pour sa dix-septième édition, Garorock aura été fidèle à son image bigarré tant sa programmation semblait hétéroclite. C’est sans doute pour cela que l’ensemble tient bien la route, grandement aide dans sa tâche qui soutient bien l’ensemble à défaut de tenir l’alcool.

Géant Vert