Un peu revenu des colères qui l'amenaient souvent à chanter des refrains en forme de slogans, Damien Saez ne passera pourtant pas une nuit tranquille tant qu'il n'aura pas mis la touche finale à son troisième album. Toujours à fleur de peau, ne manquant pas de vrais dérapages rock (à grosses guitares), « Debbie » (qui est aussi le nom du nouveau single) devrait faire moins de quarante-cinq minutes. Court mais efficace, comme le voulait Damien. Car après de premières tentatives d'écriture (infructueuses), c'est dans la douleur que Saez s'en est allé écrire les textes de ses chansons, parti pour quelques mois dans sa région dijonnaise. « Pourtant, j'étais parti sur quelque chose de totalement différent à la base : un album totalement acoustique. Mais l'été dernier, je me suis remis à faire des chansons de rock sur des riffs de base. J'y ai repris goût. J'ai bossé trois mois et j'ai zappé tout ce que j'avais fait. C'est là que je suis reparti à Dijon, où je n'ai fait qu'écrire. Un boulot de fou, de minutie. Du coup, je crois que les textes du disque n'en seront pas digestes dès la première écoute. J'aimerais beaucoup les éditer dans un beau bouquin à la rentrée. » Voilà pour l'accouchement des mots, pénible et dolore, à la virgule près. Extatique, en forme de long voyage sous trip, « Debiie » invite aussi des instrument peu coutumiers des chansons de Saez, comme ces cuivres qui s'invitent à la fin du morceau-titre. « Dans la chanson « J'hallucine », je raconte un peu un trip à la « Tueurs Nés ». Vraiment hallucinatoire (…). Ça reste rock. Ça risque de surprendre les fans, mais une chanson comme « Debbie » reste, malgré son fond ska, nourrie d'un aspect brelien. Ce que j'aime dans cette chanson, c'est qu'elle m'évoque la vie, ce qui n'est pas dans les habitudes. « Danse la vie ! Transe la nuit ! » Rien à foutre du reste. »

Une gourmandise de la vie que l'on ne connaissait pas chez Saez, plutôt regardé comme un marginal du rock français, un reclus, un artiste maudit.

« Ce disque est justement plus rock parce qu'il y a plus de vie, plus de danses. Dans la chanson « Marie ou Marilyn » (une chanson carrément punk-rock, NdR), je parle de « la beauté du sale, dans la beauté du mal ». Est-ce qu'il y a quelque chose de plus rock que ça ? Je ne crois pas. »

Retourné vers un son beaucoup plus viscéral et brut, Saez ne se dédit pas pour autant du grand écart classique de « Katagena ». « Je pense que je retournerai à cette forme d'écriture... moins travaillée. Mais pour plus tard : là, je trouve que c'est tellement mieux quand c'est bien écrit, quand il y a un sens derrière. » De décembre à avril, Saez a donc passé quatre mois en studio (en Angleterre et à Paris), histoire de coucher les partitions sur lesquelles allaient être chantés ces textes si précieux. « Sur la musique, on a été aussi intransigeant. Il y a d'ailleurs eu plein de choses super, mais que l'on n'a pas pu mettre sur le disque. Je voulais que ce soit concis. Voilà ce dont j'avais envie, de concision, de neuf ou dix titres qui font bloc. Qu'aucune chanson ne choque par rapport à une autre. »

Thomas Vandenberghe