Sur la solitude

Y a des jours tu vois la solitude, ça te tente bien tu vois, ça t’apaise, ça te repose ça te réconforte ça te rassure, ça t’accompagne la solitude, parfois. Puis y a des fois la solitude c’est quand tu passes sous une échelle puis tu te ramasses le piano des déménageurs dans la tronche, il t’écrabouille mais tu meurs pas, même pas assommé toujours conscient, conscient que t’as mal t’as putain d’mal, que t’as mal que t’es bloqué, immobilisé, paralysé. Tu hurles pour qu’on t’entende pour qu’on te voie qu’on te vienne en aide, tu hurles tu vomis que t’as mal que t’as putain d’mal mais personne t’entends ou bien ils s’en foutent tous, ils s’en foutent tous ça va chez eux pourquoi s’asseoir et prendre du temps pourquoi essayer de comprendre quand ça va chez eux, et pourquoi tu voudrais qu’on ait envie de te comprendre. Et il y a elles. Elle. Elle pourrait passer, même pas besoin de s’asseoir même pas besoin de discuter pas besoin d’essayer de comprendre, elle pourrait passer et te donner la force juste en te regardant même un petit peu, un coup d’œil et hop elle te donne la force de repousser la piano, de le soulever de le déposer délicatement de dire c’est pas grave aux déménageurs rien de cassé plus de peur que de mal, un coup d’œil et elle te rend bon elle te rend à toi-même, un coup d’œil et la vie reprend. Et même sans ça. Je pourrais rester sous le piano. Y crever seul. Tout seul. De toutes façons j’ai pas la force. Jamais eu la force. Un type viendrait jouerait au piano, mon piano, un air doux un air triste, un air mélancolique, alors je gueulerais j’dirais pas de tristes à mon enterrement, aujourd’hui on célèbre la fin des temps puisqu’on est tous dans la même merde autant en profiter, autant savourer… Tu la ressens comme ça toi aussi, Jean ? La solitude ?


« Moi c’est surtout que je suis claqué tout le temps, je sors jamais. J’aimerais bien avoir l’énergie, t’imagines, avec de l’énergie, je pourrais sortir tout le temps hyper tard, je connaitrais plein de monde. Et même sans sortir, si un soir je sors pas je pourrais regarder peut-être un épisode de plus, un ou deux… »

J’ai pris mon premier billet pour ailleurs, pour aller voir le monde qui ne m’attendras pas. Pourquoi voudrais-je qu’il m’attende, pourquoi aurais-je besoin qu’il m’attende. Pourquoi aurait-il besoin de m’attendre ? J’ai pris le premier train qui passait par là. Comme on la voit dans les films comme on la lit dans les livres cette frénésie, ce courage qui n’en est pas vraiment un puisque en fait, on peut pas vraiment faire autrement. Un jour on se lève et on sait. On sait que ici maintenant ne convient plus et que le sel n’a plus de sel que le nom. La mer que l’on n’a plus vue depuis si longtemps a le goût de l’amer alors pourquoi on irait pas dans ce train pour autre part vers cette mer, vers l’océan. Vers elle.

Maman, j’aurais aimé avoir un peu de courage. Parfois le matin je me lève, il est déjà si tard. Comment pourrais-je espérer me barrer. Y a rien pour moi. Ici. Ailleurs. Nulle part. J’ai déjà fait ce rêve. Elle venait à moi et me disait, viens on se tire, attends, je fais ma valise, on s’en fout de ta valise, là où on va, on n’en pas besoin on aura besoin de rien. Tu y crois ? Au besoin de rien ? Ça sonne doux rien. Ça délivre de tout.

J’ai pris mon premier billet pour ailleurs et elle aussi, alors on a pris le train. J’ai tendance à avoir mal au dos, tu le sais bien, quand je reste trop longtemps dans la même position, alors on a choisi pas loin pour commencer, on a choisi un train un peu plus cher un peu plus confortable qui va vite et pas si loin. Pour commencer. On était fous de joie à l’idée de laisser derrière nous tout de s’encombrer de rien on roulait vers l’inaccessible qu’on vivait déjà en fait. Juste rouler c’est déjà être un peu là-bas.

On n’a rien mangé le coup-là, le wagon-bar très peu pour nous, ça nous intéressait pas de raquer la blinde pour du décongelé sous cellophane. On s’en foutait en fait. Y avait qu’à voir par les fenêtres les villages qu’on connaissait pas pour avoir un début de rassasiement. Un début de petit goût d’autre part.
En fait Maman, la vie, ça tient à peu de choses. Un matin ça va pas alors on prend le train et ça va mieux. Mon pauvre garçon ça se saurait si la vie était simple…

Pour mettre tout le monde d'accord sur ce débat, je vais citer :

"J'envoie des likes, des connexions
J'envoie ce que j’ai bouffé hier
J'envoie la photo de ma grand-mère"

Voilà mon plus grand reproche à cet album,
Il balance juste quelques phrases, parfois sans rapport les unes aux autres.

Vivement le retour des chansons à histoires


Humour absurde, excellent passage, j'ai adoré

C'est pas une histoire à la Varsovie, mais c'est put*** de vrai et put*** de drôle dit comme ça...

Et quand je suis d'humeur à écouté Varsovie j'écoute Varsovie...

C'est juste ouf, un mec capable d'écrire et de jouer des registres aussi différents.


Why not
A voir si dans 10 ans tu reviens sur "j'envoie" comme tu peux revenir sur "varsovie"
Perso Varsovie , j'y reviens encore maintenant et toujours avec le même frisson


Sur ce point on bien est d'accord

Je voulais juste souligner que je trouvais ces quelques vers (très simples on est encore d'accord) plutôt inspirés... (ce n'est que mon avis !)

Pour mettre tout le monde d'accord sur ce débat, je vais citer :

"J'envoie des likes, des connexions
J'envoie ce que j’ai bouffé hier
J'envoie la photo de ma grand-mère"

Voilà mon plus grand reproche à cet album,
Il balance juste quelques phrases, parfois sans rapport les unes aux autres.

Vivement le retour des chansons à histoires


Humour absurde, excellent passage, j'ai adoré

C'est pas une histoire à la Varsovie, mais c'est put*** de vrai et put*** de drôle dit comme ça...

Et quand je suis d'humeur à écouté Varsovie j'écoute Varsovie...

C'est juste ouf, un mec capable d'écrire et de jouer des registres aussi différents.

Quand il écrit de la poésie, beaucoup moins de personnes relaient...

Le coup de génie en fait. Le mec se met au niveau des "p'tites putes", chante un son spécialement pour elles, ça ne leur plaît pas, c'est inadmissible. Un max de pub, et une dénonciation simple. L'évidence crachée au visage.

Sans oublier le "caprice" : si j'ai pas mon million de like, on sort pas le disque.

En gros, une chanson provoc' qui lui fait sa pub et qui dénonce. Coup de génie.

Bon, si le reste de l'album est au même niveau ma théorie s'écroule

Mais plus j'écoute la chanson, plus les mots me semblent choisis EXPRÈS POUR être maladroits, puérils, bancals, "à la p'tite pute des réseaux" quoi...

La musique, je la trouve pas mauvaise. Différente de ce qu'il fait d'habitude. Et c'est ce que j'aime chez lui. Le "différent de d'habitude"...

Je croise tous mes doigts, même les orteils, pour que tu aies raison


J'ai du mal à imaginer qu'il puisse nous sortir un cd complet de textes bateaux quand on voit la richesse des textes récents publiés sur CcC. Je pense que c'est une vraie attaque dans le but de faire du bruit, sans faire d'esprit avec les "simples d'esprits"... D'où l'intérêt d'en faire une chanson porte-étendard. La comm' est faite, c'est le moins qu'on puisse dire...

La chanson me fait un peu penser à "pleure pas bébé" dans son écriture, dans laquelle il interprète un camé simplet qui a du mal à s'exprimer, mais le cœur pour. Je trouve cette chanson très intéressante et surtout très sincère. J'ai entendu beaucoup de personnes adorer cette chanson, peut-être l'ont-ils vécu. J'ai un ami qui est tombé très bas dans la drogue, ses capacités actuelles ne lui donneraient guère la possibilité d'écrire beaucoup mieux qu'avec des mots aussi simples. Mais justes. Ecouter en live, la fin notamment.

J'espère ne pas me tromper, vraiment ! J'y crois à ce #humanité. D'ailleurs, une bonne partie des autres titres peuvent dissimuler de la poésie... "Humanité" "Les guerres des mondes" "La mort" "J'envoie" "La belle au bois" "Amour criminel", ça m'intéresse vraiment...

Le coup de génie en fait. Le mec se met au niveau des "p'tites putes", chante un son spécialement pour elles, ça ne leur plaît pas, c'est inadmissible. Un max de pub, et une dénonciation simple. L'évidence crachée au visage.

Sans oublier le "caprice" : si j'ai pas mon million de like, on sort pas le disque.

En gros, une chanson provoc' qui lui fait sa pub et qui dénonce. Coup de génie.

Bon, si le reste de l'album est au même niveau ma théorie s'écroule

Mais plus j'écoute la chanson, plus les mots me semblent choisis EXPRÈS POUR être maladroits, puérils, bancals, "à la p'tite pute des réseaux" quoi...

La musique, je la trouve pas mauvaise. Différente de ce qu'il fait d'habitude. Et c'est ce que j'aime chez lui. Le "différent de d'habitude"...

La dernière fois que j’ai vu mon grand-père, j’ai pas voulu lui dire en revoir. Je me rappelle ma mère, elle les appelle. Oui. Oui. D’accord. « On arrive tout de suite », ils ont dû dire, je sais pas moi, je les avais pas au téléphone. Mais je savais, j’avais compris, c’est l’âge où on comprend encore tout. Puis avec le temps, les choses s’accélèrent, les choses nous échappent. Comme quand on met une boîte de conserve sur le tapis roulant à la caisse, si on la suit pas la conserve s’en va. Hop. Donc on la pose sur le tapis, on la suit, on paye, et on se barre avec. Enfin je vais pas tout vous apprendre non plus, à un moment faut tester, la vie. Faut sortir de chez soi.

C’était l’époque où y avait pas internet, les parents l’été emmenaient les enfants voir le monde, la France au moins, la montagne la compagne, ça dépendait du temps et du budget. Je me souviens surtout de parents qui emmenaient leurs gosses voir des trucs, et pas d’enfants plantés dans les pieds des mecs pendant leur congé payé. C’était long neuf heures de bagnole mais bon sang comment t’expliques que j’en garde un si bon souvenir ? Je bouffais des gâteaux apéros me demandez pas pourquoi pendant une bonne partie du trajet à la radio un type du ministère de l’éducation glorifiait les mesures prises contre l’obésité à l’école. A la rentrée, plus de sodas mais des distributeurs de bananes ! J’m’en fous les sodas j’aime pas ça, et les bananes j’aurai pas les sous pour les acheter. Pas concerné. C’était l’époque où les parents l’été emmenaient les enfants voir le monde. Cet été-là nous sommes allés voir mon grand-père mourir.

En fait on pourrait écrire plein de trucs, ou rien, ça serait toujours faux, et même ça ça sonne hyper faux. Rend-on honneur un jour aux gens qu’on a connus, qui nous ont aimé, qu’on a pas vus qu’ils nous ont aimé ? Un animal je vous dis. Cours, cours te cacher, bientôt les blouses blanches seront là et ils l’emmèneront. Il faudra redresser la tête lever les yeux les plonger dans ces yeux qui ont fait leur temps. Est-ce que tu pleureras ? Tu aurais pleuré ? Je regrette rien, ça s’est passé comme ça. Le silence. Je me suis caché un temps puis assis sur le petit mur j’avais le soleil dans la nuque. Sa maison au loin. Ils sont entrés. Aussitôt ressortis, avec lui. Beau, grand. Fatigué. Puis quelques pas avant de disparaître par l’escalier. Avant de disparaître pour toujours. On m’a cherché, est-ce qu’on m’a cherché ? « Tu viens dire au revoir ?».

J’ai rejoint ma chambre. A table, je n’ai pas posé de question. Je n’ai jamais posé la moindre question. Je crois que je ne regrette rien. Mais je lui ai jamais dit au revoir.

Pas d’envie

J’ai pas envie d’écrire. C’est fou, je suis au bar avec un café avec une feuille avec un stylo, y a une musique sympa les filles autour sont souriantes, et pour moi c’est le calme plat, le calme morne, le vide… Le café a coûté bonbon mais j’ai laissé un pourboire parce qu’un des sourires m’a fait du bien, bon maintenant ça fait un peu pervers dit comme ça, ça fait type qui consomme pas que du café mais à la base c’était ultra sincère alors le reste, je m’en fous, viens pas te gâcher l’humeur tu le fais très bien tout seul, pense pas à après quand tu feras le compte du jour, le grand décompte quand le sourire sera même plus un souvenir, deux euro cinquante le café c’est quand même pas une victoire, le café franchement discutable à deux euro cinquante on commence à parler d’investissement inconscient, la preuve sur le papier offert avec y a marqué : « Total HT + TVA », sans compter le pourboire, ça fait tout de suite matheux, ça fait tout de suite mec bien dans sa tête et dans ses pompes. Tout ça pour dire, je sais pas pourquoi, j’ai pas envie d’écrire. J’ai pas pris de bière, c’est peut-être ça, c’est sûrement ça, d’habitude j’en prends une, j’écris. Là j’en ai pas pris, j’écris pas. J’aurais peut-être dû en prendre une, j’aurais écris, après, c’est en comptant sur le fait qu’écrire, c’est bien, je veux dire, y a quand même une petite gymnastique à faire, un tour de passe-passe, des questions à se poser, faut pas tirer des conclusions hâtives, écrire c’est peut-être pas bien, tout comme boire trop de bières, y a plus digeste. Elle est quand même jolie, la serveuse… J’espère que ma pièce lui fera plaisir, voilà, c’est ça, c’est symbolique la pièce, la pièce, c’est le plaisir… Merde… Plus j’y pense plus je me dis que donner ma pièce à une jolie fille c’est le même geste que quand je donne aux clodos… Putain si je laisse ma pièce, elle va peut-être faire le rapprochement, ça va peut-être pas lui plaire, elle va m’en vouloir, me traiter de ducon, putain, bonjour le symbole, bravo le plaisir, j’aurais dû prendre une bière, une triple, une de celles quand tu les bois y a tout qui se passe sous tes cheveux si t’en as, le frais de la bière qui te rafraîchit, le goût qui te réchauffe et si tu prends une deuxième pinte le prix qui te glace direct, surtout si à un moment, la serveuse t’a souri… Putain, pourvu que ma pièce foute pas le merdier, dans sa tête ou dans leurs comptes, qu’il y a pas une règles pour les pourboires et que la fille va pas se faire niquer, au bout du compte, qu’elle aura pas de la rancœur, moi la rancœur j’aime pas ça et après ça, avec de la rancœur je pourrai plus revenir, je pourrai plus, ou alors si, je pourrai, elle me sourira mais son sourire sera faux, il sera faux et y aura de la rancœur et comme un vent de tragédie… Je prendrai peut-être une bière ou café… Putain, elle me sourit, elle me sourit, je fais quoi, je fais quoi ?

Jésus



Tu lui diras quoi à Jésus quand tu le verras toi ?
Comment voudrais-tu que je le voie ?
Imagine un instant : on s’est gourés. Faudra bien passer devant Jésus, s’expliquer et demander pardon pour les fois où on l’a traité de Ducon. Tu justifieras ça comment toi ?
Je dirai qu’on s’est gourés.
T’as pas peur toi ! Tu crois vraiment que ça va se passer comme ça, qu’il va t’appeler : « petit chenapan » te mettre des claques dans le dos et t’inviter à sa nappe lors des dimanches pique-niques ?
Bah peut-être. Tu voudrais que je lui dise quoi ? Merci pour celles que j’ai aimées qui ne m’ont jamais vu ? Merci de les avoir fait si belles, les femmes, et moi si… de m’avoir fait aimer, moi ?
Je vois pas le rapport avec le fait qu’on l’appelle Ducon…
Putain mais l’amour, tu sais ce que c’est l’amour ? Avant de le dire, ton putain de « je t’aime », t’as essayé de le ressentir pour de vrai, de le comprendre ton « je t’aime » ?
Euh… Tu parles à qui là ?
Putain de gros con qu’a jamais pu comprendre qu’y avait pas que les filles, que le bonheur, c’est pas que ça, c’est peut-être pas que ça.
Ah, t’es pd ?
Jésus je lui dirai que je croyais pas en lui, que j’y croyais pas du tout et qu’au final le faire pas exister c’était presque une putain de fleur, ouais une putain de fleur de pas le tenir responsable de toutes les merdes qu’il y a dans le monde. Je lui dirai Juliette qu’on m’a enlevée bien trop tôt, je lui dirai de me remercier de jamais lui en avoir voulu et aussi de pas lui péter la gueule.
Un temps.

Ah, ça se termine comme ça ?
Bah ouais tu voudrais mettre quoi d’autre ?

Douzième dessin.

C’est pas l’Apocalypse. C’est pas la fin du monde. Ni le début. Pourquoi ce besoin de repères tout le temps ? Une femme, un homme, (un homme, une femme), seuls sur un bateau. La marque du bateau ? Ça m’importe peu, qu’ils soient sur frêle esquif ou sur un galion ou sur un navire de croisière avec des cocktails ou même sur un radeau. Ils sont seuls, ils sont deux. Au milieu de l’océan. Seuls au milieu des vagues de leur chant, et l’odeur du sel…

Viens on y va, viens on s’en va. Les autres ? On s’en fiche des autres, faut que tu penses un peu à toi. Moi ? Non, non, moi je pense à toi d’abord, pour moi, on verra après, on verra après.
Au loin un phare s’allume, enfin la terre, mais la terre depuis qu’on l’a quittée, depuis qu’on ne l’a plus vue… On n’y croit plus, on s’est fait notre propre lumière sur le bateau. Et la terre depuis, on s’en fout, on a notre lumière sur le bateau.

T’as besoin de quoi sur ce bateau ? De quoi écrire ? Tu voudras dessiner les vagues ? A notre retour, on les montrera à qui, tu crois que ça intéressera qui ? T’as vraiment besoin que ça intéresse du monde ? J’veux dire, c’est des vagues.

Les vagues sont nôtres… Et quand elles sont tempêtes… Toi qui croyais plus en rien, t’appelles ça comment, t’écris ça comment ce sentiment qui t’écrase, qui te mets à genoux… Et là boum, « boum », pas très littéraire, parce qu’en plus faut que ça fasse littéraire, quand elles te tombent dessus les montagnes, qu’il faut les décrire les montagnes, qu’il faut l’écrire, passer du vide aux larmes. Depuis qu’on navigue ensemble, je ne me noie plus.

Il y a tellement à dire qu’on ne peut être rassasié. Mais comment le dire ? Et pour qui ? Faudrait que ça aille plus loin, rends-toi compte un instant, imagine un instant, ferme les yeux et sent les échardes sous tes pieds qui te meurtrissent la peau, sent l’eau et le vent qui te glacent, le sel qui s’insinue partout, jusqu’au plus profond… Pas de formule toute faite.

Viens on s’en va, moi j’y crois au bonheur, on peut-être bien, allez viens, prenons le bateau, ils ne nous retrouveront pas, oui mais on aura froid, on aura faim, je m’en fous allez viens, même si ça dure trois jours et puis plus rien tant pis si ça doit finir comme ça. On va vivre un peu avant de mourir.

Un tourbillon. Un maëlstrom. Majestueux. Et dévastateur. Voilà c’est ça, il est là ce sentiment sur lequel tu mettras pas de foutu nom. Je pourrais marquer qu’il est beau qu’il est grand, je pourrais parler de l’horizon le matin même, du silence, le calme plat et de quand t’as souri, quand t’as parlé quand t’as brisé le silence quand t’as brisé mon confort, que les flots se sont déchainés. Indescriptibles et beaux.

Je les trouverai pas les mots. On peut peut-être rien y faire, c’est peut-être mieux comme ça. Loin des flots tumultueux. Loin des vagues et du sel. Ça bouche les artères de toute façon, trop de sel. Et moi là-bas, je n’y arriverai pas. On s’en sortira pas. Je m’en sortirai pas. Le fait est que là, tout de suite, j’ai des trucs devant les yeux. Je peux pas te les décrire. Je peux pas les compter, mais y a deux heures j’y voyais rien. Parle encore un peu. Chante encore un peu. Je crois que ça se dessine peu à peu… Un jour j’y arriverai, un jour on ira.

Sérieusement ? On y va. Finis tes pâtes, et on y va.

Onzième dessin.

Ils disaient que mon petit frère il est mort, mais c’est pas vrai, il est pas mort mon petit frère hier soir c’était raclette à un moment sa patate préférée elle est tombée elle a roulé sous la table et c’est Jimmy le chien qui l’a mangée, haha, il est rigolo Jimmy le chien, mais là il est pas là Jimmy, Maman elle a dit : « dis-lui au revoir » et elle est partie avec, avec la laisse la caisse et tout, comme quand on l’emmène pour longtemps qu’on sait qu’il reverra pas la maison tout de suite tout de suite. Au revoir Jimmy le chien.
Il faut que tu comprennes… Tout ne se passe pas toujours comme prévu, il y a ceux qui vivent et ceux qui vivent plus, un jour faudra faire le grand saut, toi aussi, un jour. Arrête un peu avec Jimmy, tu sais très bien que Jimmy… Non je n’aurais jamais fait de mal à Jimmy, comment aurais-je pu ?
Et quand je serai sur le ring je fais quoi ? Tu frappes fort fort fort ! Et si je frappe pas assez fort ? Eh bien tu esquives ! Grand frère, ça veut dire quoi : « esquive » ? C’est un truc quand tu le fais tu gagnes. Tu crois ? Tu vas y arriver petit frère. Et si je gagne pas même si je fais « esquive » tu m’aimeras toujours ? Je t’aimerai toujours petit frère.
La tête a cogné. C’était mon premier jour, mon premier stage, on m’a dit : « tu veux prendre le bébé ? », j’ai dit oui, à un moment je me suis retourné, la tête a tapé. C’était un accident, c’était un accident ! Je peux prendre le lit du haut ? Je fais de l’asthme en été.
Il est rigolo Jimmy quand il dévore sa patate et quand je veux la reprendre pour la lui éplucher il me dit qu’il préfère sans, quel farceur ce Jimmy, il pourrait au moins partager. Mais que fait Déborah ?
Miaou !
On peut plus vivre comme ça. Il faut que tu acceptes, il faut que tu acceptes si tu ne veux pas me perdre. Tu ne dois plus parler de lui.
Tu te souviens, sur le bateau, ce soir d’été ? Je me rappelle t’avoir parlé de son parfum se mêlant à celui des vagues, j’avais dû faire un jeu de mot, un truc avec ses cheveux qui lui revenait dans la figure, elle les bouffait quand elle m’a dit « oui », je pensais que ça avait gâché l’instant et toi tu m’as dit que c’était ça la magie, la magie c’était se souvenir des cheveux mangés, cinquante, soixante ans après. Je m’étais trompé pour la bague, pour la taille, elle a fini à la mer. On était pas triste pourtant, ce jour-là, on était vivant pour toujours, petit frère, on a jamais été aussi vivants que sur ce bateau ce soir d’été.
Brigitte, tu sais quoi ? Y a le vieux de la chambre dix-sept, il m’a aussi appelée Jimmy, je croyais que c’était toi qu’il appelait Jimmy

Merci pour tout tes petits avis qui me font bien plaisir !

Neuvième dessin.


Papi ? Pourquoi tu me racontes toujours tous tes trucs ? Ton tour du monde, mamie et tous les autres trucs. Pourquoi tu me les racontes tout le temps ? T’as jamais bougé d’ici. Tu crois que ça m’intéresse ? Que ça peut m’intéresser ? Je veux dire tu crois vraiment que je peux encore en avoir quelque chose à foutre ? je veux dire, … m’en veux pas, j’essaie juste de comprendre, ce qui se passe dans ta tête, ce qui se passe dans ma tête. Pourquoi j’en ai rien à foutre ? Pourquoi tu crois que ça peut m’intéresser ? Pourquoi t’as ce besoin que ça m’intéresse papi, la plupart de tes trucs c’était il y a au moins 50 ans Papi ! Papi ? Tu crois qu’on change avec le temps, qu’on devient chiant avec le temps, qu’on devient sage et vieux et fou ? Ou t’as toujours été pareil ? Papi quand on l’a brûlée la vie, d’une traite et que plus personne… on regrette Papi ? Tu regrettes Papi ? M’en veux pas Papi, j’essaie de comprendre. T’étais comme moi Papi ? Toi aussi au début t’as rêvé, puis c’est passé ? Toi aussi Papi quand une fille te plaisait t’avais le cœur fou ? Tu voulais l’emmener loin, loin de tout, traverser les océans, fuir la raison, cette putain de raison qui fait qu’on finit… comme toi ? Papi ? Il y a un moment de la vieillesse où on a vraiment envie de mourir ? Où on sent que c’est la fin de son tour et que c’est un peu aux autres ? On en a marre un jour Papi ? On en a marre ? Pour l’instant moi j’ai juste peur. J’ai peur des filles qui me rendent le cœur fou Papi… J’ai peur de traverser les mers et de fuir la raison Papi... Et pire que tout, j’ai peur de jamais y arriver Papi… De pas être capable. Je crois que je suis comme toi. Papi, tu crois que mes petits-enfants m’aimeront ? Qu’ils seront fiers quand moi je serai insipide ? Qu’ils m’écouteront avec leurs yeux tout rond ? Pourquoi j’ai ce besoin qu’un jour ça les intéresse mes trucs, Papi ? Quand j’aurai vu la mer depuis le rivage et que la raison aura éteint mon cœur fou… Qu’importe si on devient insipide. Moi je serai plus vieux, plus sage, plus fou, mais j’aurai pas de regret Papi, moi je serai comme toi. J’aurai ton âge, j’aurai mon âge, on fera qu’un Papi ! Et les trucs que je fais, que tu fais plus, que je ferai plus, ça sera mon sel Papi, ça sera mon livre avant d’aller dormir et quand je verrai ce gosse, comme il tourne les pages de son bouquin, ça sera toi Papi, ça sera moi… Papi ? En vrai le temps n’a pas d’emprise sur nous ? Ou je suis juste con ? Papi ? Toi aussi t’aimes ça le sel ?

Les globes

Putain (encore). Ça vaut le coup d’inviter les gens, pour piquer dans leur verre et qu’ils te regardent écrire. Ça y est, tu y es, le grand numéro, t’écris comme si c’était la dernière fois et pourtant, t’auras l’occasion d’en chier d’autres, des merdes, t’as vu, on a pas besoin des autres, on se pisse dessus très bien tout seul… Ce soir fallait que j’écrive, pour qui je sais pas, pour moi peut-être, putain pour moi te rends-tu comptes de ce que ça veut dire, « pour soi » ? Ce soir fallait que j’écrive ces yeux, les yeux de cette fille, putain ces yeux, putain ses yeux j’ai fait le tour du monde dans ses yeux, pourtant c’était pas long, c’était un peu court jeune homme mais moi j’ai pas résisté, mais moi, j’ai craqué. C’était pas la femme que j’aime et je pense pas être fétichiste des globes oculaires non plus, mais dans les siens y avait la liberté, y avait tous les possibles et ma prison d’un coup, y avait à la fois le soleil et la lune, y avait l’Univers y avait elles, y avait Mathilde y avait Nana, y avait Vivi y avait Chacha, et toutes celles que je, et toutes celles qui… T’es con mon gars ça n’a aucune espèce d’importance tout ça, tu te l’es toujours dit tu l’as toujours su, et pourtant des claques comme ça et pourtant, des yeux comme ça… Qui te disent les filles, qui te disent l’amour, qui te disent la vie en un battement de cils… Putain mais trouve-les, les mots ! Garde pas ça partage c’est trop bon, l’amitié l’amour la bienveillance, ce petit truc et horizon, la vie, l’envie… Un regard ça te refout à ta place, et cette putain d’envie et la lutte, tu y crois, toi, tu crois toi que putain ce que c’est bon une envie qu’on ne peut, une envie qu’on ne veut, jamais, jamais assouvir… Ça te cloue sur place entre le fantasme et la prison, ça te laisse là… Et putain que c’est bon, l’éphémère…

Ce soir

Ce soir, c’était un d’ces soirs, un d’ces fameux soirs où j’me retrouve à la porte du boulot et là, j’sais pas choisir, j’sais pas choisir entre chez moi et le Monde, j’sais pas choisir, j’me retrouve seul l’espace d’une éternité à me dire qu’ce soir, je veux pas rentrer, ce soir, j’rentre pas chez moi, ce soir, je m’assois à cette table j’commande une bonne bière j’adore ça, et j’m’habille la solitude avec les rires des filles, avec leurs regards, même s’ils sont pas pour moi les regards, même s’ils sont pour d’autres les rires. Un homme joue un air de saxo j’le connais mal cet instrument mais ce soir il me passionne ce soir c’est mon préféré, putain qu’t’es con d’pas l’connaître plus, vas lui parler, vas lui parler, dis-lui qu’c’est beau et qu’t’as jamais su putain qu’t’es con t’as jamais su, fais pas la même erreur, joues. A la table d’à côté un gosse avec ses parents regarde le lion page quatre de son bouquin il écarquille les yeux grands comme ça j’savais pas qu’on pouvait autant, c’est vrai qu’il est beau ce lion putain il est beau, c’est un beau lion merveilleux… Ça fait combien d’temps qu’toi ça t’fait plus rien les lions ? T’en as vu combien dans ta vie c’est au combientième qu’t’as décidé qu’ça pouvait plus t’faire rêver les lions, qu’c’était un animal comme les autres, à quatre lettres, à quatre pattes, avec la crinière et le rugissement, le beau lion quoi, t’aurais répondu quoi toi, on t’aurait dit : « il est beau le lion ! » t’aurais dit : « oui oui c’est un beau lion », et le gamin : « waaaah c’est ça un vrai lion ? » il aura un ami pour une nuit entière le gosse il va en rêver toute la nuit du lion et c’est vrai, putain c’est beau un lion, c’est des souvenirs en chair et en plastique mais quand on est gosse putain qu’c’est bon l’plastique, et le gosse qui va en rêver toute la nuit il est rêvera peut-être encore demain soir, et si non il rêvera d’autre chose… C’est quand la dernière fois qu’t’as rêvé toi ? Ça aurait été une belle soirée les filles l’saxo le gosse les lions mais vous comprenez l’appart’ est payé si j’rentre pas chez moi ce soir trois cent cinquante divisé par trente jours ça fait onze balles, j’ai quand même pas payé onze balle mon appart pour pas y être ce soir…

Cinquième dessin.

Docteur, j’ai perdu toute confiance en moi. Tiens donc ? A vrai dire, je ne sais plus qui croire. Alors vous avez perdu confiance en d’autres, pas en vous ! Vous pensez pouvoir me convaincre, moi qui ne fais plus confiance aux autres ? Vous pouvez avoir confiance en moi. Vous allez me faire mal, Docteur. Je ne fais de mal à personne, moi. Si Docteur. Vraiment ? Ma voisine, Docteur. Votre voisine, j’ai fait mal à votre voisine ? Elle est morte Docteur. C’était un accident, rien qu’un accident. Elle s’est suicidée, Docteur. Docteur ? Quoi ? Vous croyez qu’on y survit à tout ça ? A tout quoi ? A tout ça. On doit tous mourir. Non Docteur, il y en a qui meurent… et il y en a qui vivent. Je ne saisis pas très bien. Non Docteur, vous ne saisissez pas. Vous croyez à l’Enfer Docteur ? Je ne suis pas croyant. Moi non plus, pourtant j’y crois. Docteur ? Vous avez déjà eu mal ? Vraiment mal ? Je connais la souffrance. Vous croyez ? Moi, je ne sais pas ce que c’est, vous voyez, j’ai perdu toute confiance en moi. Parfois j’ai mal, mais je ne sais pas si je souffre. Il y en a qui souffrent beaucoup plus que vous, vous l’avez dit vous-même, il y en a qui meurent… Docteur, vous croyez que c’est mal d’écrire sur la souffrance quand on n’y connait rien ? Je crois que rien n’est vraiment mauvais à partir du moment que ça vous fait du bien. Je pourrais vexer quelqu’un ? On pourrait ne pas vous comprendre, mais vous n’êtes pas obligé de montrer ce que vous écrivez. Docteur ? Je ne meurs pas, mais je ne vis pas non plus. C’est ça souffrir ? Vous avez mal ? Parfois oui, un peu. Que vous manque-t-il dans la vie ? Il devrait me manquer quelque chose ? Si vous souffrez, c’est qu’il vous manque quelque chose. Un ami ? Un parent ? Une compagne ? Ce doit forcément être une personne Docteur ? Non, bien sûr. Docteur ? Oui ? Je ne m’aime pas. C’est important de s’aimer. Docteur ? Oui ? Vous êtes vraiment Docteur ? C’est peut-être ça, votre problème. Quoi donc Docteur ? Je ne suis pas Docteur. Alors comment on fait ? Comment on fait quoi ? Pour la vie ? Les questions ? On fait avec. Vous vous sentez mieux ? Ça vous a aidé d’écrire ? Vous avez pu répondre à vos interrogations ? Non Docteur, quelle était la question ?

Deuxième dessin.

Quand t’as choisi ces deux jouets pourquoi t’as choisi ceux-là ? Je voulais me rappeler l’importance des souvenirs, la puissance des souvenirs, je voulais les emporter avec moi, mettre un nom sur un truc comme si ça pouvait le sauver, l’emmener plus loin, un tout p’tit peu plus loin, mais pas trop loin pas comme les vieux tout moches, les tout-plissés, on dirait qu’ils ont pas su s’arrêter à temps, faudrait les repasser, les repasser avec le fer la table et tout, mais c’est interdit, enfin je pense faudrait voir si y a une loi qui punit les mecs qui repassent les vieux pour qu’ils soient moins plissés. De toutes façons j’ai toujours été nul en repassage, je fais des faux-plis m’est avis que l’ancien y préfère garder ses vrais-plis ça fait moins négligé… Faudrait pouvoir s’arrêter quand on veut quand c’est la bonne heure pour dormir, ou alors se dire que la bonne heure c’est peut-être maintenant, qu'on peut être heureux là tout de suite et que si on attends pour se le dire il sera trop tard, la bonne heure ça pourrait être maintenant et maintenant ça pourrait être toujours, même quand on est un vieux tout plissé, et si maintenant c’est toujours alors y a pas besoin de souvenirs, maintenant c’est toujours, alors pourquoi j’ai emporté mes jouets de quand j’étais petit comme s'ils dataient d'hier, et pourquoi deux y en avait plein dans le coffre pourquoi ces deux-là si j’avais besoin d’aucun, pourquoi t’as pris ces deux jouets le dragon et la princesse sans savoir qu’une semaine après d’autres donneraient tous tes jouets, comment tu peux les aimer ces jouets que t’as abandonnés, pourquoi tu fais pas autre chose, travaille, écrit, bois, gagne de la tune claque de la tune faut te rendre à l’évidence le grand décompte c’est tout de suite tes jouets te sauveront pas.

T’es qu’un emmerdeur, on te file un dessin magnifique et tu parles de tes jouets, t’as vu un chevalier, un dragon, une princesse et t’es tombé dans le panneau, droit dedans comme on dit, t’as même pas vu le message, le fond, t’as rien compris, rien, t’as jamais rien voulu comprendre, ce qu’elle voulait te dire ce qu’elle voulait que tu lui écrives, un dessin magnifique un chef d’œuvre une cathédrale et toi, t’es passé à côté, du message, du truc en plus, t’es passé à côté. Tu me dégoûtes. Une fois de plus t’as rien compris du tout. La bonne heure c’était peut-être maintenant et un jour tu l’auras dans l’fion.

Et j'ai de la reconnaissance pour toutes et tous, et c'est un plaisir de pouvoir m'exprimer sur un forum en lien avec un chanteur qui m'a apporté à ce point...

Eh bien, je te remercie pour tes lectures et pour ta présence aux rendez vous que je propose ! Et tes avis me motivent, il y aura une suite à ce texte. Merci encore.

Chapitre un.

Le tout commencerait par une discussion chiante pour ne pas dire pénible, avec des pleurs et peut-être même des assiettes pétées, pas du sang, ça ferait cliché, des accusations peut-être, des pardons en demi-teintes avoués à demi-mots comme des injures, comme des couteaux c’est-à-dire à mots complets pour finir, un demi-mot dans certains cas, c’est déjà un mot. Pour faire ce bouquin faudrait que le mec voyage, qu’il s’ouvre au monde qu’on lui dit, y t’faut des projets, pas besoin de voyager qu’il glousserait, lui qui s’est rendu compte tout seul sur sa chaise, regardait-il un porno ça il ne nous l’avouera jamais, lui qui s’est rendu compte l’autre jour que vieillir en fait, c’est pas si grave, que vieillir en fait, c’est beau. Il fera la morale à un sexagénaire (Dieu qu’il aime ce mot), le mec lui dira : « putain, vieillir c’est beau », et le vieux dira : « quoi ? » en réglant son appareil pour les oreilles, si tant est qu’il aura amassé assez de thunes dans sa vie pour en avoir un (ouais je prends pas en compte la sécu’, c’est mon bouquin t’as qu’à en écrire un tu mettras la sécu’ dedans), et le gosse de vingt-trois lui dira que l’important c’est pas d’entendre, qu’on peut vivre sans entendre regarde les aveugles, et le vieux lui dira : « quoi ? ».

Ça se passerait dans un appart’, celui qu’on a et qu’on est content d’avoir grâce aux APL, heureusement qu’on les a ceux-là, et la scène n’aurait aucune saveur, une vieille scène de rupture moisie comme on voit au théâtre, au mauvais, celui que je ne vais pas voir, celui q ue je ne joue pas c’est pour ça que je sais qu’il est mauvais, c’est pour ça qu’il va pas le voir l’auteur qui parle de lui à la troisième personne dans son bouquin, eh oui, c’est son bouquin, et les critiques diront « c’est inouï ! », ou alors « c’est d’la merde », vous avez vu le mec il sait même pas où il va avec son roman « qui fera cinq cents pages », il patine à la première et il pense déjà aux critiques, peut-être qu’il pense au pognon, au sandwich triangle qu’il pourra s’acheter avec ses gains, avec un peu de chance il pourra se prendre un maxi, avec un peu de chance, il se prendra même un coca et il aura une pièce à filer au clodo de devant le magasin, celui qu’on dit qu’y fait que boire donc qu’on lui donne pas de sous, enfin c’est ce qu’on dit aux repas où on parle de politique, je les aime pas trop ceux-là parce qu’après je suis souvent malade parce que j’ai trop bu, et quand je vomis je pense au clodo, y pourrait tenir les cheveux de l’auteur qui les a fort longs, pour pas les salir, et le clodo dirait : « toi, t’as acheté de l’alcool », « oui mais du bon, tu peux pas comprendre ». Alors maintenant quand je donne une pièce au clodo de devant le magasin je me dis qu’il va prendre une des bières qu’est bien notée dans mon livre de bières bien notées, et je déculpabilise, et lui aussi, et on vit dans un monde de déculpabilisés, c’est beau… Ça y est le bouquin fait une page, sauf peut-être pour vous si vous lisez après la mise en page de l’éditeur, vous êtes peut-être à la page cinq, c’est con ça fait comme quand les voix sont décalées dans les films que je télécharge, c’est pour ça m’a dit un pote, regarde les films en VO. Le bouquin fait une page et l’auteur va faire une pause whisky maintenant. A bientôt si vous en avez dans le falzar. (Dieu qu’il aime ce mot).

Les trois paumés

PREMIER - J’ai lu un truc y’a pas longtemps, je ne sais plus trop où… ça parlait du fait que quand on meurt, on a toute notre vie qui nous repasse devant les yeux. Si ça se trouve, on est déjà tous morts depuis longtemps, en train de revoir nos vies défiler sous nos yeux.

DEUXIEME - Incroyable.

TROISIEME - Et ça se peut ! Mais alors dans ce cas, quand on revit notre vie, et qu’on re-meurt, on revit notre deuxième vie ?

DEUXIEME - La même que la première donc ?

TROISIEME - Ben... oui. Non ?

PREMIER - Je sais pas. Mais le plus effrayant, c’est que si c’est vrai, alors on sait déjà tous ce que c’est, la mort. Et la vie, on sait plus du tout ce que c’est.

TROISIEME - Et du coup, un type qui est mort, là, pendant qu’on regarde nos vies défiler devant nos yeux, vous pensez qu’il est déjà en train de revivre une fois de plus sa vie ?

DEUXIEME - Tu crois que ton grand-père mort y a bientôt quatre ans est en train de t’apprendre à faire du vélo ?

TROISIEME - Bah peut-être !

PREMIER - Dans ce cas il a un tour d’avance sur toi.

TROISIEME - Quoi ?

PREMIER - Ben si, c’est comme les anniversaires. Quand deux personnes naissent la même année mais avec plusieurs mois d’écart, y a toujours un moment où l’un est plus vieux d’un an que l’autre. Regarde, moi, en mars, j’ai eu 27 ans, tu en avais encore 26, là on est en juillet tu as 27 ans toi aussi ! Non ?

TROISIEME - …

PREMIER - Là en cycle de vie humaine, c’est comme si on était entre le mois de mars et le mois de juillet : ton grand-père a eu 27 ans, toi tu les auras bientôt.

TROISIEME - Tu crois ?

PREMIER - Enfin, ça c’est si notre théorie est juste, et c’est si c’est comme les anniversaires. Qu’est-ce t’en penses toi ?

DEUXIEME - Moi je pense que c’est des conneries. Si c’était vrai, on serait seul ou conditionné. Donc, c’est des conneries.

PREMIER - C’est-à-dire ?

DEUXIEME - Ben si on voit nos vies défiler devant nos yeux quand on meurt, chacun dans notre coin, ça veut dire que les autres n’existent pas. Là, si c’est ma vie que je vois défiler devant mes yeux, vous n’existez pas. Vous êtes que des images, un film que je me tape en boucle sans m’en rendre compte.

PREMIER - Je vois ce que tu veux dire, je crois.

DEUXIEME - Mais si au contraire, tout est lié, si on est conditionné, ça veut dire que la vie, c’est une rotation perpétuelle. On meurt et hop, c’est reparti pour un tour. Ton grand-père avait quel âge quand tu es né ?

TROISIEME - Soixante ans. Pourquoi ?

DEUXIEME - Bon, eh bien tu comptes pile soixante ans après le jour de sa mort et tu devrais trouver le jour de la tienne dans notre cycle. A l’instant où il est mort, il est « né » dans sa deuxième vie. Si tu es né quand il avait soixante ans, tu devras mourir pour renaître, comme lui, à ce moment-là. Quand il aura de nouveau soixante ans. Tu comprends ?

TROISIEME - Non. Mais j’imagine que ça me fait un peu de marge avant de mourir du coup ?

DEUXIEME - Sauf si les cycles ne s’écoulent pas à la même vitesse. Tu peux très bien mourir demain, si soixante ans pour lui ça équivaut à quatre ans pour nous.

TROISIEME - Donc on peut pas savoir ?

DEUXIEME - Ben non, on peut pas.

PREMIER - En plus si ça se trouve c’est n’importe quoi. Moi, j’ai lu ça, comme ça. Ça se trouve, personne n’est mort et on voit peut-être pas du tout nos vies défiler quand on meurt. On meurt, point.

TROISIEME - Peut-être que quand on meurt, on voit la vie de son meilleur copain défiler devant nos yeux ?

DEUXIEME - Ta gueule. Je t’en supplie, arrête.

Très joli ! On se reconnait très bien dans ce texte...

Merci pour vos retours ! J'ai longtemps hésité à poster des choses ici (merci Meduse pour tes encouragements), ce que je fais est très différent de ce qu'on trouve sur ce forum, peut-être un peu hors sujet... (Oui le raisonnement est mauvais ! En avoir conscience c'est un début on va dire )

Merci pour votre accueil.

Dieu a fait l’homme à son image

DIEU - Qu’est-ce tu fais là ? Comment tu m’as trouvé ?

L’HOMME - J’ai marché, j’ai marché puis je t’ai trouvé.

DIEU - Ça j’m’en doute. Comment t’as fait pour arriver là ? Comment t’as fait pour arriver chez moi ?

L’HOMME - Tu n’es pas omniscient ?

DIEU - Si, d’habitude oui, mais là non. Qu’est-ce ça peut t’faire ? Alors dis-moi comment t’es arrivé là ?

L’HOMME - J’ai marché longtemps. J’ai marché dans la lumière. Plus j’avançais, plus y avait de la lumière. Je me suis dit que tu devais être là.

DIEU - Oui. La lumière c’est moi. Continue.

L’HOMME - On m’a dit : « trouve la lumière, tu le trouveras ». Et il faut bien l’avouer, ici, il y a de la lumière partout. Tout le temps. Ce n’était pas facile, mais j’ai trouvé un endroit un peu plus lumineux que les autres. Ensuite, j’ai marché.

DIEU - T’étais pas censé me trouver.

L’HOMME - Et pourtant je suis là.

DIEU - Eh bien ça m’emmerde. Tu l’as vu ?

L’HOMME - Qui ?

DIEU - Adam.

L’HOMME - Je ne sais pas. J’ai rencontré un homme qui rit tout le temps. Etendu sur le sol il rit. Impossible de lui parler, il ne répond pas. Il rit, c’est tout.

DIEU - C’est Adam. Premier gugusse de l’Humanité.

L’HOMME - Que lui est-il arrivé ?

DIEU - Il est mort. Quand il est mort je l’ai foutu dans mon Paradis. Depuis, il est content.

L’HOMME - Mais pourquoi ne fait-il que rire ?

DIEU - Il sait plus faire que ça. Il est là depuis vraiment longtemps, tu sais. C’est lui le premier arrivé. Pour ça qu’il est tout près d’mon bureau. Que veux-tu qu’y fasse d’autre ? Il a rien connu de sa vie ! Les soirées jeux vidéo avec les potes, il les a pas enchainées. Qu’est-ce tu veux qu’y foute ? Rire, c’est bien.

L’HOMME - C’est nul. On dirait plus qu’il se tord de douleur.

DIEU - Non, il rit. Il a plus besoin d’autre chose. Il est content, point. Alors ? Comment tu m’as trouvé ?

L’HOMME - Je l’ai vu, lui. Je ne savais pas qu’il était lui. Mais je l’ai vu, et il y avait de la lumière. Beaucoup de lumière. Et on m’a indiqué la route…

DIEU - Qui te l’as indiquée ?

L’HOMME - Je…

DIEU - Qui ?

L’HOMME - J’ai du mal à croire qu’il est heureux de rire.

DIEU - Bordel ! Pourquoi t’voudrais qu’y rie alors ?

L’HOMME - Ça fait vraiment vraiment longtemps qu’il est là, j’imagine ?

DIEU - Ben oui. J’t’l’ai dit. C’était le premier.

L’HOMME - Il n’est pas un peu paumé ? Aussi joli soit-il, je pense que ton paradis lui est monté à la tête. La solitude aussi, et peut-être même toi, si je puis me permettre…

DIEU - Non, tu peux pas. Tu peux pas débarquer ici et critiquer parce qu’c’est pas comme t’aimes. Dieu, c’est moi. Mon paradis il est génial et et tu peux pas être pas content. Il rit parce que ça lui plait et parce que je l’ai décidé.

L’HOMME - C’est toi qui le force à rire éternellement ? Il s’est plaint ? Et Eve, où est-elle ?

DIEU - Qui t’as dit que j’étais là ?

L’HOMME - Personne. J’ai menti. J’ai souhaité te voir, j’ai marché, et c’est tout. Au moins un qui fait des vœux cohérents ici. Là-bas, j’en ai croisé deux qui en souhaitent chacun une plus grosse que l’autre. Tu leur as donné le pouvoir d’avoir ce qu’ils voulaient. Alors forcément, y en a un qui en veut une plus grosse que l’autre, l’autre qui veut que l’autre en ait une plus petite que lui.

DIEU - Et alors ? C’est marrant !

L’HOMME - N’y a-t-il rien de plus constructif à faire dans ton paradis ? Rire pour rien ou souhaiter en vain ? Pourquoi vivre une seconde fois si aucune vie ne donne de sens à l’autre ?

DIEU - Parce que je l’ai décidé. Ton avis j’m’en fous. Y a pleins d’trucs à faire. T’as pas vu l’panneau ? Y a une sortie ski mercredi prochain. Tu devrais t’y inscrire.

L’HOMME - Je ne veux pas de sortie ski mercredi prochain. Je suis comme les autres. On est tous pareils ici, on a qu’à souhaiter et on a. Des sorties ski j’en fais quand je veux.

DIEU - L’intérêt d’ces sorties organisées est d’te permettre d’rencontrer du monde. La sortie ski tout seul, bonjour l’ambiance. Vive la convivialité. Voyons. C’est pas c’que t’as toujours voulu, tout avoir dès que tu l’veux ?

L’HOMME - Si, mais je n’en veux plus de ton don. Il n’a pas de saveur.

DIEU - T’as qu’à souhaiter qu’il en ait, d’la saveur.

L’HOMME - Je veux que tu répondes à ma question.

DIEU - Non. Toi tu réponds à la mienne. Comment t’es arrivé là ?

L’HOMME - Tu n’as donc pas compris ? J’ai souhaité te voir, j’ai marché, j’ai vu les deux obsédés qui ont désiré que je te voie aussi, puis j’ai marché, encore, j’ai vu Adam, et te voilà. On a tout ce qu’on veut ici, si je veux te voir je te vois ! On est au fond du Paradis, c’est ça ? L’origine de Tout ?

DIEU - Pourquoi qu’ils ont désiré que tu me voies ? J’voulais pas qu’on m’trouve. Ni toi ni personne.

L’HOMME - Je ne sais pas. La compassion peut-être ? Des hommes brisés au Paradis, ils n’ont pas dû en voir beaucoup. Tout le monde est content ici. Pas moi. Maintenant répond à ma question : quand ma femme me rejoindra-t-elle ?

DIEU - Y a un panneau d’affichage pour ça. Mis à jour toutes les semaines, avec les noms des nouveaux arrivants. T’aurais pu t’renseigner.

L’HOMME - Je l’ai vu ton panneau. J’ai cherché son prénom sur le panneau pendant des années. Plus de cent ans. Elle devrait être morte depuis longtemps et ici. Pourquoi je n’ai pas vu son prénom ? Et pourquoi je ne me rappelle pas ma mort ?

DIEU - Parce que tu n’as pas à te la rappeler ! Ici personne connaît sa mort. Putain, mais ils t’ont rien expliqué à l’accueil ? Ici, vous avez tous les pouvoirs, mais : vous dérangez pas le Créateur, vous oubliez votre existence merdique, vous ignorez votre mort et vous profitez ! On se casse en deux à vous prévoir des activités chouettes, et tu te plains ? Oublie que t’es mort et profite, ça vaut mieux. Maintenant casse-toi.

L’HOMME - Ma femme…

DIEU - Dégages.

L’HOMME - C’est pour ça qu’il rit, Adam ? Quand tu l’as ramené auprès de toi, il t’a vu tel que tu es ? Ridicule, méchant et incroyablement con ? C’est pour ça ? En vérité il se fout de ta gueule !

DIEU - T’es qui toi déjà ?

L’HOMME - Tu sais qui je suis !

DIEU - Eh ben écoute mon p’tit gars, si tu veux tout savoir, elle t’a buté ta femme. Elle t’aimait pas donc elle t’a buté, elle t’a pris ton fric et elle s’est barrée avec un autre. C’est pour ça qu’elle est pas là. Elle a pas sa place ici. T’es content ? Qu’est-ce tu vas faire maintenant que tu sais ? Tu vas chialer ?

L’HOMME - Elle m’a…

DIEU - Et vaudrait mieux pour toi que je te voie à la sortie ski mercredi. Maintenant casses-toi. Et en passant, raconte comment t’es mort à Adam. Lui au moins, ça le fera rire.

Putain l'amertume, quand on se rend compte que son sel n'atteint pas les étoiles, qu'il n'atteint pas les sommets, ces putains de sommets qu'on se promet enfant, qu'on se prend à rêver quand son sel n'atteint même pas le cœur des filles, n'atteint même pas le cœur d'une fille. Putain cette horreur qui hurle et qui cogne, comment dire putain comment dire la jalousie, comment dire la solitude quand milliards vous entourent, tu feras comme tout le monde et puis merde, saloperie de vie quand la mort est l'unique réconfort, ça s'arrêtera un jour dis ? ça s'arrêtera un jour, dis-moi que ça s'arrêtera un jour, dis-moi que ça s'arrêtera et qu'elles seront toujours jolies et qu'elles riront toujours, dis-moi que moi dans ma tombe je les entendrai ces rires, que moi, je les aimerai ces rires, putain qu'est-ce que je les aime ces rires, putains, ces sourires, jusqu'au bout je les aime, puisse-t-il ne pas y avoir de bout, pour aimer, aimer, aimer à en revenir.. Un peu de sel putain un peu de sel, c'est trois mots, c'est pas dur trois mots, c'est pas dur du tout, pas dur du tout...

Je pense qu'avant tout, on ne fait pas un enfant pour soi... Tout le plaisir que tout ces événements nous apportent ne peut être qu'un "complément", un "plus". Comment avoir "envie" d'un enfant ?

Je pense qu'il faut tout d'abord avoir la réponse totalement objective à la question : "la vie vaut-elle vraiment la peine d'être vécue ?"

En fait, le cd "Lulu", il est juste incroyable... Première écoute, j'ai déjà envie de le remettre. C'est très différent de ce qu'il a déjà fait, et c'est ce que j'aime chez Saez. Le voyage qu'il nous offre n'est jamais le même.

Cet album, c'est de la simplicité, de la poésie, de la renonciation, de l'abandon, de la sincérité...

Bonjour !

À part le gros rabais pour les Manifestants, y a t il des avantages a choisir la version de l'album sur CCC plutôt que d'acheter le CD ?

Merci !

Bonsoir !

Après réécoute des titres, il m'est apparu comme une évidence... Bon je sais pas si ça a déjà été dit, ressenti, bref, je vais peut-être être complètement à côté de la plaque, mais vous ne trouvez pas que "Rue d'la soif", elle sent à mort la nostalgie ? Un peu comme "Bal des lycées" mais abordée très différemment... Ce ne serait pas ses années "études" que Damien Saez serait en train de nous raconter ? Avec une prise de conscience finale du genre de celles qu'on a tous eu lors de conversation de bar... "Putain les gars, faut qu'on se bouge, peut-être faire un peu autre chose que juste se bourrer la gueule"

C'est mon interprétation, qui donne pour moi tout son sens à la chanson : à la fois une apologie de la fête, mais un retour à la réalité également : à un moment, faut prendre nos responsabilités...

"frangin t’as vu un peu la France
c’est l’heure de faire nos résistances
nos luttes à nous dans les bistrots
c’est d’finir ronds comme des tonneaux

comme des putois sûr à gueuler
les prénoms d’celles qui s’sont barrées
puis quand les autres iront voter
nous c’est sûr on s’ra trop bourré

puis quand les autres iront voter
nous c’est sûr on s’ra trop bourré
nous c’est sûr on s’ra trop
nous c’est sûr on s’ra trop bourré
nous c’est sûr on s’ra trop bourré"

Pour info, au cas où personne ne l'aurait déjà vu, il a mis les paroles des trois chansons en dessous du player dans la page "Musique" !