qu’elles soient Florentines
ou d’Argentine
petites Françaises
aux bonnes manières
qu’elles viennent des mers de Chine
ou du fond des Angleterre

qu’elles aient le cheveu roux ou la peau noire
qu’elles soient indiennes ou filles d’un soir
quand elles ont du christ à l’âme
quand elles sont belles à prendre
qu’elles soient riches de l’âme
ou pauvres de l’esprit
de bonne famille
ou bien des rues
qu’elles s’appellent
Philomène ou Eglantine
qu’elles aient des allures d’ombres de Marylin

quand elles sont seules au bar qu’on dirait des nonnes
qui ont perdu l’église qui ont plus rien que des homme
pour espérer rencontrer Dieu
pour éponger la bruine à leurs yeux
moi j’aime bien regarder
regarder les filles pleurer
ça me rend gai

qu’elles aient le cerveau de pas grand-chose
qu’elles soient littéraires, philosophes à leurs heures
quand elles prennent l’orage qu’elles me ressemblent un peu
quand elle sont toutes fragiles comme une eau qui dort

quand elles vendent leur corps pour quelques sous
quand tu mets la forme qu’elles disent oui à tout
quand elle croient qu’elles sont libres quand elles se donnent
dans les bras du Malin quand elles s’abandonnent

qu’elle soient de Bizance ou de Syracuse
de Belgrade qu’elles soient de celles qui ne pleurent plus
qu’elles traînent au soleil de Moscou qu’elles jouent
les marquise des nuits les filles prêtes à tout

qu’elles soient paysannes ou fille de ministre
ouvrière éperdue dans la fourmilière
qu’elles travaillent à l’usine qu’elles soient filles de l’air
qu’elles aient les mêmes allures de putes que leur mère
moi j’aime bien regarder
regarder les filles
pleurer ça me rend gai

dans les villes
dans les campagnes
moi je vais comme un assassin en campagne
et je taille au couteau des sourires
sur les joues des princesses

moi je suis qu’un pauv’gars ils m’appellent l’idiot
celui qui fait peur aux bêtes qui fait mal aux oiseaux
mais faut pas croire tu sais moi j’suis pas méchant
j’ai juste l’air maladroit je sais juste pas comment
faut leur parler aux filles
faut leur parler aux filles
moi quand je vois les larmes leur tomber la joue
moi quand je vois les larmes leur tomber la joue
moi j’voudrais leur dire qu’elles sont belles
et qui faut pas qu’elles pleurent pour un idiot
puis qui faut qu’elles arrêtent d’être connes
et de tomber toujours amoureuses
de celui qui faut pas et que moi si elles voulaient moi
moi j’s’rais toujours gentil avec elles
mais les filles elles aiment pas qu’on soit gentil elles aiment pas

dans les villes…

quand elles sont seules au bar ou sur les trottoirs
crucifiées par des siècles d’histoire
quand on regarde un peu plus près
c’est sûr qu’on peut se dire
que c’est elles qui ont porté
et qui portent la croix du monde

sur leurs ailes © Damien Saez

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J'accuse

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Publié le :
29 mars 2010